Je n'ai pas connu une enfance tragique, ponctué de meurtre, d'alcool, de drogue et autre fléau du genre humain. Non, je dois avouer que mon enfance était bien banale. Un père et une mère aimante. Une petite soeur adorable quand elle ne me cassais pas mes jouets. Un chien, Pomgo, que j'allais promener quelques fois dans le quartier pavillonnaire où nous habitions à l'époque. Oui, comme je le disais, une enfance banale. La seule vraie épreuve que j'ai traversée pendant mon enfance fut l'école. Hé oui, les gamins sont cruels, qu'on se le dise. Et pour une petite fille aux cheveux roux et aux joues trop rondes, avec ces quelques kilos en trop qui en font une gamine pas maigre mais plutôt grosse, l'école peut se transformer en un véritable enfer. Il est vrai qu'aujourd'hui, tout à changer, mais à l'époque, c'était terriblement dur. On parle souvent du harcèlement scolaire aux news en ce moment, mais ayez conscience que cela arrive en vrai. Et que parfois, ça peut très mal finir, ce qui comme vous vous en doutez n'est pas mon cas, mais tout de même. Ça commence par des phrases innocentes du style "Tu ne devrais peut-être pas manger ce gâteau." "Dit, pense à teindre tes cheveux, tu sais, pour avoir l'air normale." "C'est pas que t'est grosse hein, mais t'est pas maigre non plus, on va pas se mentir.". Puis il y a l'effet de groupe et tout devient plus méchant, mesquin et vicieux. Comprenez de quoi je parle. La tête plongée dans les toilettes, les rires sur son passage, les sodas renversés, la table vide à la cafétéria. Et les surnoms. "La rouquine." "La grosse." "Bouffe-tout." "Sorcière." Et on se retrouve isolé, seul à la récré, pointé du doigt. C'est compliqué de rester fort pendant ces moments là. J'ai eu la chance d'avoir des parents qui ont tout de suite compris ce que se passait, qui m'en ont parlé, qui m'ont aidé à remonté la pente, à sortir la tête de l'eau.

Mais tout ça, c'est finit. Après avoir fichu le camp du lycée, la vie commença enfin à réellement me sourire. Pomgo avait fait naître en moi une vocation, celle d'aider les animaux. Une passion qui m'avait poussé avec un naturel presque déconcertant vers un cursus de vétérinaire. Ma vie était alors bien remplie, entre mes études, mon job à temps partiel dans une clinique vétérinaire du coin et les visites de mes parents et de ma soeur. Je me sentais bien épanoui et surtout utile, ce que j'aimais le plus. Je ne supporte tout simplement pas de rester les mains croisées, sans rien faire. J'ai besoins de mouvements. Moi qui croyais me satisfaire de cette vie, j'entendu alors parlé de Jurassic World et du recrutement qui avait alors lieu. C'est un CV que je trouvais bien mince que je leur envoyais alors, avec ma maigre expérience, mon diplôme tout frais en poche et mes 25 ans trop jeune. Autant dire que lorsque je reçu ma lettre d'admission, tout le quartier fut au courant. La fête battu son plein toute la nuit et même encore jusqu'au petit jour. Et seulement quelques jours après, valise sous les bras (et sous les yeux aussi.) et stresse à son comble, je faisais mes premiers pas sur Jurassic World.

Je dois dire que tout quitter pour cette île me faisait un peu peur, mais j'ai toujours été pourvu d'un sacré sens de l'aventure. J'ai laissé ma famille avec qui j'ai toujours été très fusionnel, mes amis aussi, et mon petit-copain de l'époque avec qui j'avais rompu peu avant mon départ. Et aujourd'hui, je ne regrette absolument pas le choix que j'ai fait, il y a presque un an maintenant. Travaillé ici, c'est le bonheur au quotidien. C'est côtoyé des espèces que l'on aurait jamais du voir, créer des sourires sur le visage des visiteurs et travailler avec une équipe de choc, toujours de bonne humeur. Même si certain me tape parfois sur les nerfs. Mais je suis heureuse. C'est tout ce qui compte. Et même si parfois ma famille me manque, même si parfois le publique me tape sur le système, même si parfois je suis au bord de la crise de nerf, pour rien au monde je n'échangerai ma place.